Monsieur le Premier ministre,
Ne privez pas les peuples d’Europe du droit de dire non !
Ne privez pas les peuples d’Europe du droit de dire non !
Lettre ouverte à M. Tony Blair
par Francis Choisel et Bernard Chalumeau
Président et secrétaire général
de l’Alliance pour la Souveraineté de la France
Monsieur le Premier ministre,
Le 1er juillet prochain, vous allez présider l’Union européenne. C’est à ce titre, plus qu’à celui de chef du gouvernement britannique, que nous nous adressons aujourd’hui à vous.
Au cours des six prochains mois, en effet, après le rejet du projet de traité constitutionnel européen par les peuples français et néerlandais, à une large majorité (55% et 62%) et avec une forte participation électorale, vous aurez à trouver le compromis nécessaire entre les vingt-cinq Etats-membres sur la conduite à tenir face à ces deux votes négatifs.
Lors du prochain Conseil européen de Bruxelles, vous aurez ainsi, à côté du Premier ministre luxembourgeois, actuel président de ce Conseil, du président de la Commission européenne, du président de la République française et du chef du gouvernement néerlandais, un rôle majeur à jouer.
En prenant la décision de « suspendre » le référendum que vous vous êtes engagé auprès du peuple britannique à organiser avant toute ratification, vous semblez considérer que la campagne de Hollande et la bataille de France ont définitivement scellé le destin du projet de constitution européenne, et qu’une bataille d’Angleterre n’est en conséquence plus nécessaire.
Au plan du droit international et des règles de l’Union européenne, c’est assurément le cas. Mais la décision qu’aura à prendre le Conseil européen à ce sujet n’est pas seulement juridique. Elle est d’abord politique. Elle n’est pas seulement britannique, elle est européenne.
Evidemment, il ne peut être question de faire voter à nouveau les citoyens français et néerlandais, pas plus que d’aménager pour eux, comme pour votre pays, pour le Danemark ou pour l’Irlande, un statut d’exception, qui ne conviendrait pas à deux pays fondateurs et qui seraient incompatibles avec l’esprit même du texte constitutionnel. Il est impossible d’ignorer la sanction de ces deux grands pays, pays amis de l’Angleterre de surcroît.
Pour autant, comme l’ont indiqué le président de la Commission européenne et plusieurs chefs de gouvernement, il ne serait pas convenable d’interrompre dès maintenant de manière intempestive le processus démocratique de consultation des peuples.
On ne peut annuler les référendums déjà programmés dans divers pays, dont le vôtre. On ne peut ainsi museler les citoyens et les empêcher d’exprimer clairement leur sentiment sur ce texte en même temps que sur le fonctionnement actuel de l’Union. On ne peut leur ôter la possibilité de dire « non », eux aussi. Le processus de ratification doit donc se poursuivre.
Mais il faut aussi tenir compte d’un fait majeur révélé par les deux référendum français et néerlandais et qu’avaient déjà démontré les référendums danois, irlandais, suédois ou norvégiens : il existe une contradiction grave entre le sentiment exprimé, presque unanimement, par les parlements de ces pays et la décision rendue, à une large majorité, par les citoyens, consultés directement. Est-on sûr qu’il n’en est pas ainsi dans d’autres Etats membres ? Le doute est ainsi jeté non seulement sur les ratifications qui restent à opérer par la voie parlementaire mais également sur celles qui l’ont déjà été de cette manière.
Comme président de l’Union européenne, il vous appartiendra donc de demander que les pays, tels que l’Allemagne, qui n’ont pas consulté leur peuple sur cette question qui engage leur destin comme nation et celui de l’Europe tout entière, fassent confirmer, ou infirmer, par référendum la décision de leur parlement.
Cette initiative ne pourra que recevoir le soutien de notre président, Jacques Chirac. Il a, aujourd’hui le devoir moral de porter sur la scène internationale les aspirations de son peuple, telles qu’elles se sont exprimées le 29 mai. Les Français, en effet, en votant « non », n’ont pas pensé qu’à eux. Ils ne se sont pas « repliés sur eux-mêmes» ; ils n’ont pas « rejeté les autres», loin de là. Bien au contraire, ils ont voulu lancer un grand mouvement de rénovation dans toute l’Europe. Notre Président demande d’ailleurs la poursuite du processus de ratification.
Les autres gouvernements ne pourront pas plus s’opposer à cette manière de sortir de la crise car elle est fondée sur des bases authentiquement démocratiques et éminemment conformes à l’esprit européen.
Ensuite, et ensuite seulement, chaque peuple ayant parlé, l’Union européenne pourra repartir sur des bases réellement nouvelles.
Alors, les gouvernements auront un mandat clair pour corriger les vices avérés de cette Europe bureaucratique, centralisatrice et niveleuse qui bride les énergies, entrave les initiatives, réglemente, réprimande et sanctionne.
Monsieur le Premier ministre, l’honneur de notre Gouvernement a été de nous donner la parole. Nous, Français, serions fiers l’avoir parlé au nom de tous les peuples d’Europe, et tout particulièrement du peuple britannique, si le processus de ratification s’arrêtait demain. Mais nous serions plus fiers encore d’avoir permis qu’ils soient tous consultés, en leur âme et conscience. Et le peuple britannique le serait tout autant si vous en preniez l’initiative.
Laissez, en ce nouveau printemps des peuples, éclore toutes les fleurs du « non » !
Nous vous adressons, monsieur le Premier minsitre, l’expression de notre bien sincère considération.
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